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La « cyber-guerre » : des blogs entre dépit et colère

Sergent dans l’armée israélienne, Andrei Brudner, 18 ans, a été tué au Liban. Dans son dernier billet, publié il y a deux semaines sur son blog, il prévenait ses lecteurs qu’il était envoyé au front : « Vous entendrez peut-être parler de moi dans les médias, ça ne durera pas longtemps, mais nous avons suffisamment de munitions pour que cela dure longtemps. Souhaitez-moi bonne chance. »

Si plusieurs soldats-blogueurs américains sont déjà morts au combat, en Irak ou en Afghanistan, Andrei Brudner était le premier en ce qui concerne le conflit entre Israël et le Hezbollah. Par-delà les bombardements, la guerre se propage sur Internet. Des milliers de sites ont été « piratés » par les opposants à l’intervention de Tsahal qui, en retour, a elle-même effacé des sites pro-Hezbollah.

L’armée israélienne multiplie les actions de « cyber-guerre ». Alors qu’elle cherche à brouiller l’accès à Internet au Liban, elle a aussi envoyé des SMS et des messages sur les répondeurs téléphoniques de nombreux Libanais afin de les inviter à quitter le sud du pays. Par trois fois, elle a réussi à pirater Al-Manar, la chaîne de télévision du Hezbollah, ainsi que plusieurs radios libanaises.

Le Liban n’est pas le seul pays visé par ce type de guerre psychologique. L’Union mondiale des étudiants juifs (WUJS) vient de lancer « Mégaphone », un logiciel qui permet d’alerter ceux qui soutiennent Israël sur des articles et sondages en ligne susceptibles d’influencer l’opinion publique et qu’il convient de rectifier.

Une bonne partie des blogs israéliens dénonce la couverture médiatique du conflit. Pour beaucoup, CNN serait ainsi un « communist news network » (chaîne communiste) à la solde du Hezbollah. Leurs cibles : les images, largement reprises dans les médias, des enfants morts à Cana, qui auraient été instrumentalisées par le Hezbollah, ou encore le fait que l’agence Reuters ait retouché – pour rajouter de la fumée – une photographie des bombardements de Beyrouth, ce que l’agence a reconnu.

ECHANGES POIGNANTS

Les blogueurs libanais, eux, reprennent un photomontage du New York Times montrant les images satellites, avant et après les bombardements, du quartier de Beyrouth, aujourd’hui ravagé, où se trouvait le QG du Hezbollah. Tous, bien évidemment, dénoncent l’action de Tsahal, les pertes civiles et les conséquences du blocus et de la destruction des infrastructures du Liban. Partagés entre la colère et le dépit, ils sont nombreux, à l’instar du Lebanese Political Journal, l’un des blogs libanais les plus consultés, à tenter d’expliquer l’histoire compliquée de leur pays à tous les internautes.

Son contributeur explique pourquoi, face à l’impuissance générale, le Hezbollah représente le seul espoir de nombreux Libanais. Il n’en fait pas moins partie de ceux qui dénoncent l’organisation chiite et croit à la paix avec Israël. Une position de plus en plus difficile à tenir. Ami Ben-Basset, qui fait partie de ces blogueurs israéliens qui tentent de garder le fil avec les Libanais, rapporte ces propos d’un intellectuel de Beyrouth : « Si je critique le Hezbollah, je serai considéré comme un traître, mais si je critique Israël, je serai traité comme un sympathisant du terrorisme. »

Poignants aussi ces échanges d’e-mails entre les rédacteurs en chef des éditions de Tel-Aviv et de Beyrouth du magazine culturel Time Out, rapporté par Lisa Goldmann, journaliste et blogueuse à Tel Aviv qui utilise Internet pour rester en relation avec les Libanais, qu’elle appelle « mes voisins ». Ou ces dessins de Mazen Kerbaj, organisateur du festival de musique improvisée de Beyrouth, qui a ouvert son blog afin d’y dessiner la guerre, au jour le jour, comme l’avait fait sa mère, Laure Ghorayeb, au temps de la guerre civile au Liban. Mazen lui a aussi ouvert son propre blog : elle a recommencé à dessiner.

Jean-Marc Manach

Une réponse sur « La « cyber-guerre » : des blogs entre dépit et colère »

C’est la première fois que je découvre ce site sur le Liban. Enfin, on pense un peu à notre existence. Qu’on s’arrête de nous faire avaler les mensonges sous prétexte qu’ils servent l’entente nationale et qu’on s’occupe un peu plus du « libanais » qui ne sait plus à quel saint se vouer.
Laure Ghorayeb

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