Les établissements culturels français, Centres et Instituts culturels, Alliances françaises, des pays membres de l’Organisation internationale de la Francophonie s’adaptent aux ressources et besoins de la société où ils sont implantés. Leurs fonctions traditionnelles – enseignement du français, documentation sur la France et sur la Francophonie, diffusion de la création et débat d’idées – sont, selon le contexte, différemment accentuées. Dans les sociétés culturellement proches, dans une capitale, la programmation culturelle est ciblée, fondée sur des partenariats, complémentaire des grands flux d’échanges. Dans les pays en développement, les établissements sont des acteurs de la politique de coopération de la France.
Concernant l’enseignement du français, il ne s’agit guère dans ces pays d’acquérir un premier niveau de français général, sauf quand on s’adresse, dans un contexte francophone, à des populations allogènes, mais plutôt d’enseigner, avec des objectifs spécifiques, un français spécialisé. En Afrique sub-saharienne les établissements culturels jouent un rôle majeur comme agents de la coopération, et l’enseignement du français s’insère dans une politique globale qui vise à l’intégration régionale, à la circulation des biens et des personnes, dans un contexte linguistique éclaté. L’accès à un français professionnalisant – français du droit des affaires, du droit international, du commerce – y est un élément clé du développement. Dans la plupart des pays de cette zone, un même schéma d’organisation des établissements s’est mis en place, avec un Centre culturel français ou franco-national dans la capitale (28 Centres culturels français, 5 établissements franco-nationaux) relayé en province par un maillage d’Alliances françaises (80 Alliances françaises).
On retrouve des établissements du même type en Asie du Sud-Est, où ils jouent un rôle complet, de la programmation culturelle à la coopération. Ils dispensent un enseignement pointu du français afin de préparer les meilleurs étudiants à parachever leur cursus en France. Le Centre culturel français du Cambodge à Phnom Penh – plus de 16 000 élèves avec ses deux annexes de province – organise près de 60 manifestations par an, parmi lesquelles Nuits d’Angkor (coopération de Jean-Claude Gallota avec le Ballet Royal du Cambodge). Au Laos, le Centre culturel et de coopération linguistique de Vientiane enseigne le français à 2 200 élèves, offre sa médiathèque à 2 500 usagers et organise près de 50 manifestations culturelles, comme la Biennale de la photographie mise en place cette année par son antenne à Luang Prabang. Au Vietnam, le Centre culturel et de coopération compte 6 500 élèves, organise plus de 200 manifestations, parmi lesquelles un spectacle original de Régine Chopinot monté avec l’École de danse, ou encore le Festival international de Hué.
Un dense réseau est déployé en Afrique du Nord et au Moyen-Orient : dix établissements au Maroc, six au Liban, trois en Égypte, deux en Syrie, une présence dans toutes les capitales. Là aussi les établissements jouent un rôle polyvalent, avec forte présence du volet linguistique. Au Maroc, ils enseignent le français à 32 000 élèves, forment des professeurs nationaux, mais ils sont aussi les agents de notre coopération dans le domaine de la lecture publique et organisent avec les opérateurs locaux des événements comme les Nuits de la Méditerranée ou le Salon du livre de Tanger, à l’instar du Salon du livre francophone qu’organise le Centre culturel de Beyrouth.
Le schéma est différent à Madagascar où l’enseignement de la langue revient au réseau de l’Alliance française, tandis que le Centre culturel de Tananarive se consacre, pour les 8 500 usagers de sa médiathèque, à l’offre documentaire multimédia sur la France et la francophonie, tout en menant une importante activité culturelle ; la création, par exemple, avec le Centre dramatique national de la Réunion, de spectacles qui circulent ensuite dans la région. Dans un pays comme le Canada, le réseau des 11 Alliances françaises exerce son action auprès des populations anglophones et allogènes, menant des activités essentiellement linguistiques, avec 13 000 étudiants en 2004, dont plus de la moitié à Toronto.
Dans l’Europe de la francophonie, le réseau s’est adapté aux évolutions politiques et sociales. D’un côté, en Grèce, le réseau, ancien – l’Institut français de Thessalonique, qui appartient à la Mission laïque, fête cette année son centenaire – s’est resserré, l’Institut français d’Athènes réduisant ses annexes de 34 à 4. Pour autant, sa contribution à la dynamique francophone n’a pas été affectée, puisque profitant de l’introduction d’une deuxième langue obligatoire, l’établissement orchestre une vaste campagne sur tous les médias en faveur du français et voit ses recettes de certifications en langue française monter à 4,5 millions d’euros, sur les 6,8 millions de son budget.
Situation d’expansion en revanche, ou de consolidation des implantations, en Roumanie et en Bulgarie. À Sofia, la restitution à la France de l’hôtel particulier qui abritait l’Alliance française doit permettre de regrouper le Service culturel et l’Institut français, relayé par huit Alliances en province. L’action de ce réseau n’est pas étrangère à la présence en France de 3 000 étudiants bulgares. La francophonie traditionnelle de ce pays permet à nos établissements d’y monter d’importantes manifestations comme cette « plus grande classe de français d’Europe », organisée le 23 mars par l’Institut français de Sofia avec les Alliances françaises et la télévision bulgare : des centaines d’élèves font la même dictée au même moment dans tout le pays.
En Roumanie, l’Institut français de Bucarest, avec 3 250 élèves, les trois Centres culturels et les quatre Alliances de province constituent un réseau de foyers culturels régionaux, au service tant de la langue que de la culture et du débat d’idées. Les Centres culturels, Timisoara, Cluj, Iasi et l’Institut français de Bucarest organisent par exemple, jusqu’au 28 mars, six forums traitant vingt-quatre thèmes de débat sur la francophonie : solidarités, nouvelles technologies, innovation, universités…
Les établissements culturels français sont donc divers, à l’image du monde de la francophonie, mais partout ils y expriment une même ambition de dialogue, contribuant à ce que les objectifs de diversité, de laïcité, de tolérance, mais aussi le désir de l’universel, l’exigence de la liberté, qui fondent cette communauté, y soient quotidiennement mis en œuvre.